Francisco Franco

franco

Général et homme d'État

El Ferrol - espagne, 4 décembre 1892 || Madrid - Espagne, 20 novembre 1975

Pendant plus de 35 ans, Franco dirigea l'Espagne d'une main de fer. Bien qu'ayant renversé un régime légitime par la force et avec l'aide de l'Allemagne nazie, il parvint à rester au pouvoir après la victoire des Alliés. L'Espagne fut ainsi, jusqu'en 1975, l'un des derniers pays totalitaires en Europe de l'Ouest.

Sous le régime franquiste, non seulement la vie démocratique en Espagne fut particulièrement réduite, mais le développement économique du pays fut également retardé.

La carrière militaire
Né à El Ferrol (Galice) en 1892 dans une famille de la petite bourgeoisie espagnole, Francisco Franco veut être marin; il entre dans un collège militaire, mais, la marine ne recrutant plus, il devient élève de l'Académie militaire de Tolède. L'armée sera désormais sa vraie famille; à dix‑huit ans, il sort de l'académie avec le grade de sous‑lieutenant. Il prend part en 1912-1916 à la guerre du Rif et devient commandant, épouse en 1917 une jeune fille de la vieille et riche bourgeoisie espagnole, et participe la même année à la répression de la grève générale qui frappe les Asturies. Il est à nouveau dans le Rif en 1920-1927 et, au terme de cette guerre où il a lutté contre Abd el‑Krim, il est nommé général à 33 ans, le plus jeune de l'armée, cette armée au pouvoir en la personne de Primo de Rivera, qui le nomme directeur de l'Académie militaire de Saragosse. La république est proclamée en 1931; Franco devient gouverneur militaire de La Corogne et refuse de participer à un complot militaire, qui échoue. Rallié au régime républicain, il nommé commandant général aux Baléares en 1933, et c'est à lui que la droite au pouvoir fait appel pour écraser un nouveau soulèvement révolutionnaire aux Asturies. À la tête de l'armée d'Afrique, il réprime l'insurrection sans hésitation ni pitié, avec cruauté.

Il est alors nommé chef d'état‑major des armées (1935).

La guerre d'Espagne
Le gouvernement de Front populaire élu en 1936 l'éloigne aux Canaries: on le soupçonne en effet d'avoir pris contact avec d'autres officiers en vue d'une intervention "illégale" – en fait un coup d'État – contre les autorités régulières. De fait, le 18 juillet 1936, il prend la tête de la rébellion contre le régime et déclenche, à partir du Maroc, la guerre civile qui va déchirer l'Espagne jusqu'en 1939. Les succès qu'il remporte contre l'armée républicaine font de lui le généralissime de l'armée rebelle: c'est le Caudillo (il prend ce titre en 1937), l'aventurier maître d'une armée, celui qui utilise une clientèle pour prendre le pouvoir. Il reçoit le soutien effectif de l'Italie fasciste et de l'Allemagne nazie (qui expérimente en Espagne les derniers modèles de son matériel de guerre). La politique de non‑intervention de la France et de la Grande‑Bretagne, qui refusent ainsi de soutenir militairement le gouvernement légal de l'Espagne républicaine, conduit celle-ci à la défaite. Barcelone est prise en janvier 1939, Madrid tombe en mars. En dépit de l'aide reçue, Franco refuse cependant d'engager l'Espagne exsangue aux côtés des forces de l'Axe (Rome‑Berlin) dans la Seconde Guerre mondiale, et se contente d'envoyer une division (la División Azul), sur le front russe, participer à la "croisade antibolchevique".

L'Espagne franquiste
En 1947, Franco fait proclamer "l'État catholique et social" et rétablit la monarchie; en attendant la restauration royale, il se fait conférer, à vie, le titre de "protecteur‑régent" et les fonctions de chef de gouvernement. En juillet 1969, il désignera son successeur en la personne du prince Juan Carlos, dont il a étroitement surveillé l'éducation. Il demeure également le chef de l'armée et poursuit sa politique de répression féroce contre la gauche, les syndicats et les démocrates.

À partir de 1952, il tente de sortir l'Espagne de l'isolement politique dans lequel sa dictature l'a plongée. En 1954, sans pour autant adhérer à l'OTAN, il donne des gages aux États‑Unis en leur cédant des bases militaires en territoire espagnol. L'Espagne entre à l'ONU en 1955, puis dans l'OECE en 1958. Cependant, tandis que le régime célèbre en 1964 le vingt‑cinquième anniversaire de sa victoire sur la République, l'opposition démocratique n'a toujours pas désarmé et la répression reste ce qu'elle n'a jamais cessé d'être: féroce; ainsi, en 1964, Julián Grimau, secrétaire général du parti communiste espagnol, est exécuté; en 1974, l'anarchiste Puig Antich subit à son tour le garrot. Pour tenter de désarmer le mouvement ouvrier et révolutionnaire, Franco s'efforce de se rapprocher du Marché commun afin d'élever le niveau économique de l'Espagne et d'ouvrir largement ses frontières au tourisme, pourvoyeur de devises et de travail (constructions balnéaires et estivales). Mais, en même temps, et en dépit de ses efforts, Franco ne peut empêcher la circulation des idées: pour durer, il est acculé à la répression de toute forme d'opposition, y compris dans l'Église catholique, qui est pourtant restée l'un des plus fermes soutiens du régime depuis ses débuts. Les autonomistes catalans et basques sont très actifs pendant les dernières années de Franco (en 1973, le Premier ministre, Carrero Blanco, périt dans un attentat à la bombe).

Une économie dirigée
Sous le franquisme, l'Espagne, de façon lacunaire, s'est éveillée à la modernité économique. Appuyé sur les technocrates de l'Opus Dei, le secteur public, regroupé au sein d'une structure unique, l'INI, était gigantesque et particulièrement peu réceptif aux attentes des salariés ou des consommateurs. Pour éviter des licenciements, Franco maintenait des activités économiques hors de toute réalité de marché et déficitaires.

L'agonie
La dernière année du gouvernement de Franco fut marquée par un raidissement du régime (proclamation de l'état d'urgence, coup d'arrêt porté à la libéralisation envisagée par Arias Navarro). L'exécution, le 27 septembre 1975, de cinq autonomistes basques provoqua dans le monde une vague de protestations massives. La maladie terrassa alors le généralissime; une agonie de près d'un mois paralysa le pouvoir jusqu'à la mort de Franco, le 20 novembre 1975. Il fut enterré le 24 novembre dans la crypte de la vallée des morts (de los Caidos: "des tombés"), dédiée non loin de la capitale à ceux qui sont morts pendant la guerre civile. Une nouvelle page de l'histoire espagnole devait alors s'ouvrir avec l'accession au trône de Juan Carlos Ier, le 27 novembre. Ce dernier, avec l'ensemble des forces démocratiques et sociales, engagea progressivement l'Espagne dans une voie démocratique, créant une monarchie constitutionnelle et réinsérant le pays au sein de l'Europe et du monde occidental.

Source : © Encyclopédie Hachette Multimédia 2003